Homélie de Mgr Hubert HERBRETEAU pour l’Ascension à la basilique Notre Dame à Bon Encontre, le jeudi 26 mai 2022 Ac 1, 1-11 ; Ps 46 ; He 9, 24-28 et 10.19-23 ; Lc 24, 46-53
Chers amis, frères et sœurs, La fête de l’Ascension du Christ est intimement liée à celle de la résurrection. Pour nous chrétiens, ces deux fêtes nous conduisent à rendre témoignage de Jésus ressuscité avec fierté, ferveur, joie profonde. Nous ne sommes pas abandonnés au bord de la route. Dans notre monde si troublé par toutes sortes de crises (sanitaire, économique, sociale, écologique, politique), Jésus reste présent et nous promet l’Esprit Saint, comme aux apôtres : « Vous allez recevoir une force quand le Saint Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins (…) jusqu’aux extrémités de la terre. » Avons-nous conscience de cette force, de cet envoi en mission, de cette assurance ? De quoi devons-nous témoigner dans la société, en tant que chrétien ? Je voudrais souligner trois attitudes chrétiennes : la paix, le bon plaisir de la Vierge Marie (en particulier en récitant le chapelet), l’espérance.
Je vous donne ma paix
La paix tout d’abord. Dans les évangiles, à la résurrection, Jésus dit à ses apôtres : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » Notons le possessif : « Ma paix » ! C’est la paix du Christ qui nous est offerte. De quelle manière la recevons-nous et en vivons-nous ? Je suis étonné qu’en ce moment l’expression employée abondamment par les médias est « gagner la guerre ». Qui de Poutine ou de l’Ukraine va gagner la guerre ? Ne devrait-on pas plutôt se demander : « Qui va gagner la paix ? » Entrer en guerre conduit à énumérer les engins de guerre ou les formes de guerres : chars, missiles, armes chimiques, guerre nucléaire… Entrer en paix suppose une spiritualité de la paix, une éducation à la paix. Cette seconde expression a de la peine à convaincre. Jésus nous donne sa paix. Il se présente à ses apôtres à la Résurrection en disant : « La paix soit avec vous ! »
Entrer en guerre conduit à énumérer les engins de guerre ou les formes de guerres : chars, missiles, armes chimiques, guerre nucléaire… Entrer en paix suppose une spiritualité de la paix, une éducation à la paix. Cette seconde expression a de la peine à convaincre. Jésus nous donne sa paix. Il se présente à ses apôtres à la Résurrection en disant : « La paix soit avec vous ! » C’est à la fois un constat et un souhait. Jésus avait auparavant prononcé la Béatitude : « Heureux les artisans de paix ! » Béatitude à mettre en relation avec les autres Béatitudes : « Heureux les pauvres de cœur » ; Heureux les doux ! » ; « Heureux les assoiffés de justice » ; « Heureux les miséricordieux ».
Faire ce qui plaît à la Vierge Marie
La fête de l’Ascension est célébrée au moment où commencent les premières chaleurs et où la nature végétale se déploie pour le plaisir de nos yeux. Je pense à un dicton parmi les plus connus et que l’on se transmet de génération en génération : « En avril, ne te découvre pas d’un fil. En mai, fais ce qu’il te plaît ». Ce dicton fait partie d’une famille de dictons concernant la météo, en bonne compagnie avec celui de la pluie de la saint Médard. On cite aussi : « Quand le merle chante en mai, avril est fini ». Les saints de glace : saint Servais, Mamert et Pancrace, fêtés le 13 mai, sont également incontournables. « En avril, ne te découvre pas d’un fil. En mai fais ce qu’il te plaît » est un dicton qui invite à la prudence compte tenu du caractère imprévisible du climat. Ce dicton signifie que nous ne sommes pas totalement à l’abri des gelées et des intempéries, en avril et au début de mai. À partir des saints de glace, le 13 mai, il est devenu possible de faire ce qu’il nous plaît, conformément au dicton. Pour ceux qui aiment et vénèrent la Vierge Marie, la date du 13 mai n’est pas non plus une date comme une autre : c’est le jour que choisit la Mère de Dieu pour rendre visite à Fatima, au Portugal, en 1917, au moment de la première guerre mondiale. Marie, dans ses apparitions à trois petits bergers, insiste beaucoup sur la prière du chapelet. La 1ère apparition ne fait pas exception. En effet, la belle dame leur commande : « Dites un chapelet tous les jours pour obtenir la paix du monde et la fin de la guerre. » Prier pour la paix, c’est la volonté de la Vierge Marie. La demande de la Vierge Marie de prier pour la paix n’est pas une option. Les petits bergers vont comprendre tout de suite et vivre un chemin de prière et de pénitence qui est un véritable exemple pour nous. Nous voyons bien que les enfants de Fatima, bien jeunes encore, vont changer de vie pour plaire à la Vierge et ajuster leur volonté à celle de Dieu. Désormais, ils ne vont pas faire ce qui leur plaît, mais ce qui plaît, à elle, qui est au ciel. Nous pourrions nous aussi modifier quelque peu le dicton. Ce n’est plus « En mai, fais ce qu’il te plaît, » mais « En mai, fait ce qui lui plaît, à Elle, la Vierge Marie ! En mai, fais ce qui lui plaît est le dicton que nous devons suivre en ce mois de pèlerinage.
L’espérance chrétienne
Message de paix, désir de faire ce qui plaît à la Vierge Marie, et aussi attitude d’espérance. Voilà la grande affirmation de cette fête de l’Ascension, au moment où Jésus quitte ses Apôtres. Pour nous, les chrétiens ce qui nous fonde notre espérance c’est la promesse de Jésus de rester présent au cœur de nos vies, de nos choix et de nos décisions. Il est significatif de constater que Jésus s’adresse à ses Apôtres, au moment de l’Ascension, en les invitant à la patience. Cela se passe au cours d’un repas en mémoire de Jésus ressuscité, au cours de l’Eucharistie. Jésus donne l’ordre à ses apôtres de ne pas quitter Jérusalem et d’y attendre que s’accomplisse la promesse du Père. Cette, promesse, c’est l’envoi de l’Esprit Saint : « Moi je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis. » Au cours du repas eucharistique où le Christ se donne à nous, en ce jour de l’Ascension, redisons que le monde est grand parce que c’est le monde que Dieu aime. Nous sommes invités à en témoigner chaque jour davantage. Comme vous tous, je suis préoccupé par la guerre en Ukraine. Il est question de guerre nucléaire, de guerre mondiale. Je vous invite à prier pour la paix dans notre Europe et ailleurs dans d’autres pays du monde (Mali, Birmanie, etc.). La paix commence chez nous par des petits gestes vis-à-vis de nos voisins, au sein de nos familles. Le Christ est notre paix. Cette paix que nous demandons dans la liturgie est don de Dieu. Amen.
Mgr Hubert HERBRETEAU Basilique Notre Dame à Bon Encontre, le jeudi 26 mai 2022
7ème dimanche de Pâques
En ce dimanche après l'Ascension et avant la Pentecôte, frères et sœurs, l'Église nous propose de méditer la dernière prière de Jésus, juste avant sa mort. Jésus parle de la vie éternelle qu'il va donner.
La vie éternelle, c'est de Te connaître, toi le seul Dieu
Le point le plus frappant de cette page d'évangile c'est ce merveilleux dialogue entre Jésus et son Père. Jésus, est totalement décentré de soi et centré sur un autre: le modèle même de l'amour parfait.
La vie que Jésus veut donner, c'est la sienne! C'est la vie divine. C'est la vie que Jésus reçoit du Père «avant le commencement du monde». C'est une vie que le Père donne d'abord de toute éternité à son Fils. Le mot donner revient dix fois dans cette page: le Père a donné pouvoir à Jésus sur toute chair... le Père donne la gloire à son Fils... le Père donne à Jésus les paroles qu'il doit dire... le Père donne les disciples à Jésus...
La vie éternelle... en un mot, c'est Dieu. Laissons-nous prendre par cette formule étonnante: «Tout ce qui est à moi est à Toi et tout ce qui est à Toi est à moi.» Expression parfaite de l'amour. C'est cela qui nous est offert à nous aussi. Jésus, pour définir la vie éternelle, utilise un mot qu'il faut comprendre dans toute sa profondeur: « La vie éternelle, c'est de Te connaître Toi, le seul vrai Dieu, et celui que Tu as envoyé, Jésus-Christ. » En langage biblique, la connaissance engage toute la personne: on ne connaît vraiment quelqu'un que lorsqu'on ne fait plus qu'un avec lui... connaître, c'est communier, c'est être en parfaite commune-union... connaître, c'est tout donner et tout recevoir d'un autre.
La vie éternelle résulte donc d'une double démarche : .. celle de Jésus qui la donne. . . celle de l'homme qui l'accueille. . .
Nous sommes ici devant une réalité toute simple et dont nous avons tous l'expérience: celle de faire un cadeau, un don, à quelqu'un... Il y a toujours un double mouvement : il y a le geste de celui qui offre et le geste de celui qui reçoit. C'est le geste central de la messe: «Il prit le pain et le leur donna en disant: prenez! »
Toute la mission de Jésus a été de donner la vraie connaissance de Dieu. «J'ai fait connaître Ton nom... je leur ai donné les paroles que Tu m'avais données. » Voilà la première condition de la vie éternelle: c'est un don de Dieu, une grâce, un cadeau gratuit... qui prend la forme d'une révélation, d'une Parole qui fait connaître Quelqu'un. Mais, nous le savons bien par expérience, pour être reçu, un don doit être accueilli. Et Jésus, pour bien faire comprendre l'importance de cette deuxième condition de la vie éternelle, utilise quatre formules qui se complètent : « Ils ont reçu les paroles que je leur ai données... ils ont reconnu que je suis venu d'auprès de Toi... Ils ont cru que c'était Toi qui m'avais envoyé... ils ont gardé fidèlement Ta parole... » Quatre verbes d'une force extraordinaire et qui soulignent tout le respect que Dieu a de l'homme : comment, d'ailleurs, pourrait-on parler d'amour s'il n'était pas reçu librement ? Dieu ne force jamais une liberté humaine, c'est pourquoi la vie éternelle est à la fois un don et un accueil: et notre part à nous, êtres libres, c'est de recevoir, reconnaître, croire et garder le merveilleux cadeau offert à nos mains : « Prenez, mangez! »
Enfin, Jésus est parti. C'est le mystère de l'Ascension: «Je ne suis plus dans le monde.» Mais Il a « laissé son adresse », l'Église: « Eux, ils sont dans le monde. » Eux, c'est-à-dire, nous, les croyants, ceux qui reçoivent, reconnaissent et gardent Jésus, la Parole du Père, la Vie du Père. La messe est le signe de cela, dès maintenant, en attendant que ce merveilleux don de la vie éclate un jour en plénitude: « Il donnera la vie éternelle. »